Marcuse et la révolution culturelle

L'influence du philosophe Herbert Marcuse sur la contre-culture nord-américaine et européenne fut sans doute déterminante. Après Éros et Civilisation (1955), qui affirme la possibilité d'une civilisation non répressive, et l'Homme unidimensionnel (1964), critique radicale du totalitarisme démocratique, Marcuse s'attacha à tracer une voie concrète vers un bouleversement des structures. Dans Vers la libération (An essay on liberation, 1969), sous-titré «Au-delà de l'homme unidimensionnel», il rejette à la fois «l'hégémonie mondiale du capitalisme des monopoles», qui ne répond aux attentes de libération que par un renforcement de l'exploitation économique et de la répression militaire, et le «bloc socialiste». Ce dernier, parce qu'il doit lutter contre le capitalisme, ne peut «se débarrasser de sa bureaucratie répressive», ce qui le conduit à finalement n'aspirer qu'à suivre le modèle américain. Contre ces deux systèmes, Marcuse appela la jeunesse à pratiquer la «contestation permanente» et à s'attacher «à la création d'une solidarité réelle de l'espèce humaine, à l'élimination de la pauvreté et de la misère au-delà de toute frontière nationale et de toute zone d'intérêt, à la construction de la paix».

 

Dans Contre-révolution et révolte (Counterrevolution and revolt, 1972), Marcuse montre qu'à la révolution culturelle en cours le capitalisme oppose une réorganisation de ses structures, y compris culturelles : «Ce qui est devenu intolérable en ce monde, c'est l'implacable unité des contraires : le plaisir allié à l'horreur, le calme à la violence, la jouissance à la destruction […] il faut faire une arme politique de la protestation contre cet état de choses.» Le but de la contre-culture est donc de «développer la conscience pour provoquer une situation révolutionnaire».

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